domingo, 15 de janeiro de 2012

E Phebo Apollo Exaltou-o

Lembrado por esta partilha.


Dans l'Iliade, Troie est fatalement destinée à tomber. Mais elle est souvent en danger d'être prise d'une manière qui qui "surpasserait la décision", c'est-à-dire prématurément. Chaque fois, une divinité intervient pour empêcher qu'il soit ainsi. Le trépas qui se préparait pour Ulysse aurait "surpassé la décision", si Athéna ne l'avait pris sous sa protection. Autant il est dans la nature de Moira e poser des limites à la vie, autant il est dans celle des dieux de protéger la vie aussi longtemps que possible. Mais tout a une fin. Dès que Moira entend faire son entrée, les dieux n'ont plus qu'à lui laisser la place.

Ils ont par avance, et avant l'homme, connaissance de la décision. "Zeus et les autres dieux immortels savent bien auquel des deux la mort est impartie", dit Priam, avant même que ne commence le duel entre Pâris et Ménélas. Zeus sait que la mort est proche d'Hector. la seule chose qu'il puisse faire pour lui est de laisser resplendir une fois encore l'éclat de sa gloire, avant qu'il ne s'éteigne à jamais. A l'instant décisif, le grand dieu sent pourtant son coeur se briser de devoir livrer à la mort Hector, ce héros, irréprochable, qui ne manqua jamais de respect envers sa divinité. Il se tourne vers les dieux et leur pose la question: Ne voulons-nous donc pas le sauver? Athéna l'avertit: "Qu'as-tu dit là! Tu veux sauver de la puissance de la mort un mortel condamné depuis longtemps à un destin de mortel? Fais-le; mais nous, les autres dieux, nous ne pouvons pas approuver." Zeus apaise sa fille: il n'avait pas parlé sérieusement. Le destin suit à présent son cours. Mais à l'instant du dénouement, il lui faut parler explicitement. C'est pourquoi le père céleste saisit la balance d'or et y pose deux Kères (celles qui apportent la mort), la première pour Achille, la second pour Hector. Le plateau qui porte le "jour du destin" (αἴσιμον ἦμαρ) d'Hector plonge tout en bas jusque dans l'Hadès. C'est le signe. Au même moment, Apollon s'écarte d'Hector, à qui il avait jusqu'ici donné des forces.

[...]

Zeus a déploré le destin mortel qui échoit maintenant à Hector. Il a même convié les dieux à tenir conseil pour savoir s'ils ne veulent pas le sauver. "ou bien le moment est-il venu pour nous, si noble soit-il, de l'anéantir par la main d'Achille, fils de Pélée?" Tels sont lest termes de l'alternative. Athéna donne un avertissement sérieux, et Zeus se modère tout à coup. On pourrait croise à présent qu'il va faire en personne les préparatifs de la catastrophe. Mais son attitude est purement négative: il laisse faire Athéna. "Fais comme tu veux, et ne tarde pas!", dit-il á sa fille, qui se rend aussitôt de l'Olympe sur le champ de bataille. C'est alors que se déroule la scène significative dont nous avons déjà pu nous faire une idée. Dès que Zeus, à l'aide de la balance d'or, a fait connaître la volonté du destin, apollon abandonne Hector, et Athéna s'approche d'Achille. Elle l'aide d'une manière qui paraît choquant aux modernes. Mais c'est seulement parce qu'ils n'ont pas compris le sens de cet événement. Sous l'apparence trompeuse d'un frère d'armes, la déesse encourage Hector à demeurer sur place et à se battre avec Achille. Plein d'une joie reconnaissante, Hector se prête à la manoeuvre. Il croit engager le combat en ayant un fidèle second à ses côtés. Mais au moment où il a besoin de lui, ce compagnon s'est évanoui sans laisser de traces. Athéna l'a laissé à son adversaire plus puissant. Hector comprend immédiatement que, pour lui, c'est le fin. Il ne cherche plus qu'à mourir dignement. On aurait dû remarques depuis longtemps la grandeur d'une telle pensée: la déesse, qui agit ici pour le destin, aide en réalité l'infortuné à avoir une morte glorieuse et honorable.

[...]

Au lieu de cela, on s'est arrêté á critiquer Athéna de parler contre la vérité et de tromper la confiance d'Hector. Au moment crucial, elle ne dit pourtant que la simple vérité: "Achille aux pieds légers aura le dessus sur toi dans cette poursuite." Cela ne pouvait plus faire de doute, dès lors qu'Apollon, dont il avait reçu la force de courir, l'avait abandonné. Le poète le souligne avec insistance. Là n'est pas l'essentiel pour nous. L'important est d'observer qu'Athéna agit ici pour le destin. Toute son action est le reflet fidèle et effroyable du règne de la fatalité.

[...]

Le poète s'est ainsi expliqué avec suffisamment de clarté sur la façon dont les dieux agissent dans le sens du destin. Si la vie d'Hector n'avait pas été condamné, son affrontement avec la force supérieur d'Achille aurait signifié le risque d'un "surpassement de la décision" (ὑπὲρ μόρον) et aurait été empêché par un dieu. Effectivement, jusqu'au moment où la balance de Zeus fait connaître le destin, Apollon est aux côtés d'Hector. Il lui donne des forces et, comme le souligne expressément le poète, il empêche son adversaire de l'atteindre. Mais il lui faut ensuite se retirer et laisser la place à Athéna, c'est-à-dire au bonheur d'Achille. Tandis qu'Athéna protège et exalte la vie d'Achille, elle devient fatalité pour celle d'Hector. Nous ressentons avec une profonde horreur ce qu'il y a de démonique dans les circonstances qui conduisent à la mort. d'Hector. Le divin devient démonique pour ceux que le destin appelle.


Walter Friedrich Otto. Les Dieux de la Grèce (305-309) Claude-Nicolas Grimbert & Amel Morgant (trad). Payot: Paris (1981)

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